Châteaux du Charolais-Brionnais
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D'après une série d'articles rédigés par Sébastien Acedo et parus dans le Journal de Saône-et-Loire en juillet-août 2008
Le château de Charolles : cœur de la Terreur de 1793
Remous de l'Histoire oblige, l'ancien château ducal est frappé durement par la Révolution Française et le régime de la Terreur. Climat de suspicion et procès sommaires vont se déchaîner avec passion.
Au confluent de l'Arconce et de la Semence se dressait autrefois avec fierté le château fort médiéval de Charolles. Résidence secondaire des ducs de Bourgogne comtes du Charolais, celui-ci tombe peu à peu en ruines dès le XVIe siècle avant d'être racheté, rasé et reconstruit. Mais comment cette forteresse militaire a-t-elle pu devenir en moins d'un siècle l'antichambre de l'arbitraire révolutionnaire ? Dans quelles conditions de détentions et à quel triste dessein étaient voués les prisonniers ? Récit.
Une maison d'habitation cossue : Très vite, le château de Charolles perd ses lettres de noblesse et ses fonctions défensives et militaires. Contraints de guerroyer avec force, les ducs de Bourgogne n'ont d'ambition que d'étendre la zone d'influence et les frontières du duché jusqu'aux confins de la Méditerranée. Résultat : le château tombe progressivement en désuétude. Il fallait lui redonner une seconde peau. C'est ce que va réaliser Pierre François Bernigaud de Cerrecy. En 1775, année où le domaine est aliéné par Louis XV au nouveau procureur du bailliage, celui-ci entreprend de tout rebâtir. Son but : abandonner tous les attributs militaires pour en faire une parfaite maison d'habitation cossue tranquille en plein cœur de la cité de Charolles. Oui, mais voilà, la Révolution en marche allait troubler ce calme ambiant.
Tout condamné à mort aura la tête tranchée ! 1793 : à Paris, Robespierre organise la répression des dissidents au régime sur fond de violence, illégalité et arbitraire. Pendant ce temps, à Charolles, les lois de la Terreur se répandent et diffusent un vent de suspicion et de dénonciations. La 5e tour du château conservée, rebaptisée « Tour de diamant » accueillera dans ses lieux la prison. Et durant tout l'épisode de la Terreur, elle renferme l'histoire de vies humaines fauchées. Celle de Guillaume de Thésut est symptomatique. Un jour, celui-ci aurait lancé dans une taverne de la ville, sous l'effet de l'alcool, un magistral « vive le roi ! ». Erreur fatale qui lui coûtera cher. Le malheureux est arrêté sur le champ, puis jugé lors d'un simulacre de procès avant d'être guillotiné. Guillotiné ? Enfin presque ... Rappelons que Charolles ne disposait pas de guillotine pour ses exécutions, celle-ci se trouvant à Chalon-sur-Saône. Seule solution, trancher à la hache par un bourreau, beaucoup plus douloureux pour le condamné, nécessitant de s'y reprendre à plusieurs fois.
Des épisodes plus heureux : Épisode plus heureux, celui de Jean-Michel Bernigaud. Fils du juge grenetier du grenier à sel. Il habitait à Paris et ses allers-retours à répétition ont attisé des soupçons d'espionnage dans la région. Arrêté, jugé, il est en toute logique condamné à mort. Or, résidant à Paris, son exécution devait se faire à la capitale. Escorté par la garde, il entame un long périple mais la chance luis sourit vite. La voiture verse en chemin et les réparations retardent le cortège. Or, lorsqu'ils parviennent à hauteur de Paris, ils apprennent entre-temps l'arrestation de Robespierre et son exécution. La Terreur tombe, Jean-François Bernigaud est sauvé. D'autres pourtant n'auront pas eu cette chance. Pis encore, on a retrouvé dans les archives les cas de prisonniers entassés jusqu'à 150 dans un espace aussi humide, sombre, froid et étroit qu'une cave. Dans de telles conditions de détention, certains succombaient d'asphyxie ou de piétinement.
Légendes et mythes : La page de la Révolution tournée, les lieux sont vendus. Aujourd'hui propriété de la commune, l'hôtel de ville s'est installé sur les ruines du château mais en a conservé toutes ses légendes dorées. La première d'entre elle, l'existence d'un souterrain relié au château de Montessis dans la plaine de Changy. Long de 4 km, il n'a pas encore été révélé faute de recherches. Son entrée est bouchée par un éboulement. Mythe ou réalité ? Affaire à suivre ...
L'âge d'or des Amanzé au château de Chauffailles
Grande famille emblématique de la seigneurie de Chauffailles à l'époque médiévale, le destin des Amanzé va croiser celui du château de Chauffailles. Et ce pendant plus de quatre siècles avant de se briser définitivement sous les coups de la Révolution.
Situé au cœur de l'actuelle commune, le château de Chauffailles domine la lisière du bourg au bord du Botoret. Sa composition comme sa structure porte les stigmates d'une histoire médiévale et moderne à rebondissements. Précédé d'une allée de platanes, le château, consistant en un gros corps de logis rectangulaire flanqué de deux tours rondes, témoigne de son ancienneté. Une ancienneté dont il faut puiser la source au XIVe siècle.
La conquête de la seigneurie par les Amanzé : C'est au détour d'une sombre affaire d'assassinat que Jean d'Amanzé prend la tête de la seigneurie de Chauffailles en 1380. Avant lui, la seigneurie était aux mains de la famille des Villon. Ce dernier avait érigé à l'emplacement du château une tour de surveillance à proximité de la voie romaine. Depuis 1234, la famille de Villon exerçait le droit de justice et d'administration. Mais c'est l'assassinat d'un bourgeois de Châteauneuf en 1380 qui va renverser l'hégémonie des Villon sur la seigneurie de Chauffailles. Jean d'Amanzé s'installe alors à Chauffailles trois ans plus tard et débute l'édification du château. La maison d'Amanzé trouve ses origines dès le XIe siècle dans le Brionnais mais il faut attendre 1383 pour que ses armoiries et son blasonnement figurent à Chauffailles. Des armoiries composées de coquilles d'or au nombre de trois, censés symboliser le pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle. Or, une légende locale attribue le nombre de ces coquilles au nombre des membres de la famille morts en Terre Sainte. Avec Jean d'Amanzé, onze générations de cette même famille lui succéderont jusqu'au XVIIIe siècle. Une longévité rare lorsque l'on connaît les remous de l'histoire médiévale locale. Le secret de cette longévité ? Il s'explique en partie par les rapports privilégiés qu'entretenait Jacques d'Amanzé avec Charles le Téméraire, dernier duc de Bourgogne. Une fidélité qui lui sera récompensée. En 1460, en contrepartie de son engagement dans l'ost du Téméraire (armée ducale), Jacques d'Amanzé obtient l'autorisation d'ériger la tour principale du château. Des archères, aujourd'hui bouchées, accueillaient à l'époque des bombardes ou des couleuvrines. La vocation militaire du château prend forme. À la mort de Jacques, son épouse, Marie-Anne Rollin reprend elle-même le fief en 1681. C'est à elle qu'on doit notamment l'appellation de Chauffailles sous sa forme actuelle et non plus Choffailles ou Choffaillies. Mais l'épopée de la maison d'Amanzé prend fin en 1718 avec l'union de Marie Cécile d'Amanzé avec Claude-Marie de Saint-Georges, marquis de Vichy. Faute d'héritier mâle, le nom d'Amanzé se dissocie de l'histoire de son château.
De la Révolution à nos jours : Fait rare dans l'histoire locale de la révolution de 1789, le château n'est pas séquestré comme bien national. Toutefois, il subit des dommages lourds. Deux ailes sont entièrement rasées, les fossés comblés et la dépendance, vendue et morcelée. Il faut attendre 1820 avant qu'un propriétaire occupe à nouveaux les lieux. Pierre Deville, richissime industriel de Paris s'établit à Chauffailles pour fonder une blanchisserie et une usine de tissage mécanique de la soie. Puis il est vendu à un autre industriel, Casimir Dumoulin, dont la fille Élisabeth cédera à son décès en 1941, la totalité du domaine à l'hôpital de Chauffailles. La commune rachète le château en 1981 pour lui donner une vocation publique : un centre sportif et un lieu de peinture et d'art. À l'initiative de Marcel Journay, illustre dessinateur local, il est proposé d'aménager l'intérieur du château pour en faire le cadre idyllique de la création artistique pour amateurs. Aujourd'hui encore, son fils perpétue sa mémoire et son œuvre. Le château est devenu six siècles après les Amanzé, un lieu de création libre pour tous.
Chassenard : une affaire de familles bourgeoises
Siège de la mairie de Chassenard aujourd'hui, le château de la Croix n'était hier qu'une maison bourgeoise cossue du XVIIe siècle. Deux familles locales vont s'efforcer de lui redonner prestige et influence. Tout cela en moins de deux siècles.
Acquis par la commune en 1978, le château de Chassenard est aujourd'hui entièrement dédié à ses concitoyens. Une vocation toute proche de ce que les occupants des siècles romantiques se sont efforcés de construire et de diffuser largement à la population locale. Et pourtant, sans la moindre archive le concernant, le château s'est coupé pour toujours d'une partie de son histoire et de ses secrets. Alors comment expliquer qu'une simple bâtisse bourgeoise soit devenue château ?
Les chantiers de la famille Gay : Au XVIIe siècle, la bâtisse de la Croix est propriété exclusive de la famille Gay. Originaires de Dole, en Franche-Comté, ils se sont installés une première fois à Bourbon-Lancy avant de prendre définitivement leurs quartiers à Chassenard avant 1600. Quelques-uns d'entre eux laisseront leur nom à la postérité. Robert Gay, fermier pour la commanderie de Beugnet, demeurait au lieu-dit « la Croix ». C'est ce lieu-dit qui sera conservé pour nommer au XIXe siècle, le château de Chassenard. Transmis par héritages directs selon les règles de la primogéniture mâle, les Gay ont pu asseoir une véritable dynastie familiale bourgeoise. Une dynastie qui a œuvré à l'embellissement des lieux par toute une série d'aménagements architecturaux visibles. Au milieu du XIXe siècle, deux ailes sont ajoutées au corps de logis, lui-même embelli. Dernier vestige de ces travaux : les lettres G et R ont été apposées sur les toitures. Un hommage au couple Félix Gay (1845-1909) et son épouse Marie Rochard (1860-1925), instigateurs des agrandissements. Quant à l'intérieur du château, peu de chose saute aux yeux en l'absence d'archives. Heureusement, les murs laissent des traces : des coups de crayons de papiers de deux artisans peintres laissés derrière les boiseries du salon. Son contenu ? « L'an 1896, le 14 janvier, terminé le salon les peintres, bu 104 litres à 14 sous ». On le comprend bien, peindre donne soif !
Au-delà des lieux, c'est toute la commune qui est marquée par la famille Gay. Mme Gay aura laissé le souvenir d'une femme active et déterminée, notamment dans la transformation complète de l'église romane Saint-Georges. Une femme au destin tragique. Une mort dans la solitude. Ses 5 enfants seront enterrés avant elle. La dernière demoiselle Gay, Marie-Antoinette épousera le nouveau propriétaire des lieux : Renaud de La Celle. Avec elle, une dynastie bicentenaire s'éteint. Mais deux œuvres subsisteront : un château typique de la Sologne bourbonnaise avec ses losanges de briques noires sur fond de briques roses d'un côté, les armoiries de la famille de l'autre : « d'azur au chevron d'or avec deux étoiles et la pointe d'un croissant ». Une page se tourne.
Adjugé, vendu pour 655 000 francs ! Nouvelle famille, nouvelle époque. Les de La Celle auront à affronter l'épreuve douloureuse de la guerre. Ils feront du château, un lieu de refuge et de protection de sa population. L'épouse de Gérard de la Celle, charitable dans l'âme, se consacre aux œuvres sociales et au catéchisme. Mais surtout, c'est en créant un ouvroir pour les prisonniers de guerre qu'elle prouve son esprit d'entraide. Pourtant, La famille ne connaîtra pas le même rayonnement que les Gay. En 1978, à la mort de son père, Alain de La Celle cède le château et ses terrains à la commune pour la somme de 655 000 francs. Et depuis 30 ans, le message est resté le même. Tout mettre en œuvre pour que les lieux soient dédiés aux habitants de la commune. Il était donc légitime d'y installer les bureaux de la mairie. Oui mais pas que ... La cantine scolaire occupe la première tour, une pièce pour les associations à l'étage, la bibliothèque municipale dans une autre. Mais encore ? La salle polyvalente est située dans les anciennes ... écuries du château ! Quant à l'ancien salon marqué du passage en 1896 des deux peintres, il est aujourd'hui « salle des mariages » où l'on célèbre chaque année des dizaines d'unions. Oui mais voilà. Sans archives, l'histoire fait défaut.
Le château de La Clayette : de père en fils depuis 1722
Entre les mains de la famille de Noblet depuis trois siècles, le château de La Clayette est un des rares témoignages de longévité et de stabilité de ses propriétaires. Il est aussi le seul épargné par l'épreuve de la Révolution. Récit.
Foi de propriétaire, il est une forteresse imprenable. « Il n'a jamais été pris de toute son histoire ! » confirme Amaury de Noblet, l'occupant des lieux. De quoi en faire renoncer plus d'un. Et il y a de quoi ! 33 hectares d'eau, des douves à l'étang, assurent sa protection. Mais alors comment expliquer que le cœur de l'une des seigneuries les plus importantes de la région ait été l'épargné des guerres et des soulèvements ?
La forteresse de l'Histoire : « D'une Toussaint à l'autre », c'est le temps qu'il a fallu pour construire l'édifice. Court ! C'est indéniable. Mais lorsqu'on se place en 1380, c'est de l'ordre du miracle. Toujours est-il qu'il nous donne une idée de l'impressionnant chantier et du nombre d'ouvriers et d'artisans nécessaires à son édification. Et le cahier des charges était ambitieux pour l'époque : dresser une forteresse à vocation défensive exigeait une sérieuse maîtrise de la poliorcétique (ndlr : technique du siège dans l'attaque comme dans la défense). Ce qui explique notamment l'extrême largeur des douves pour s'adapter aux balbutiements de l'artillerie médiévale lourde. Et des crises, le château en a connu. En 1420, il est confronté à la présence anglaise. La raison ? Nous sommes en pleine guerre de Cent Ans (1337-1453) et le duché de Bourgogne, rival du roi de France, s'est rallié aux Anglais. Or, à La Clayette, Louis de Chantemerle, propriétaire des lieux se révèle être un parfait opportuniste. Ce dernier est conseiller du roi Charles VII, premier chambellan et en même temps écuyer du duc de Bourgogne. La population ne lui en tiendra pas rigueur. La frontière entre les deux royaumes se situait sur l'étang.
L'hôte des rois de France : Malgré son enclavement géographique, le château de La Clayette est le seul château du Charolais-Brionnais à pouvoir se prévaloir d'avoir accueilli deux rois de France en moins d'un siècle. D'abord, Louis XI (1461-1483), François Ier ensuite (1515-1547). Le premier se rendait en pèlerinage à Beaujeu. Des lettres de Louis XI écrites depuis La Clayette et conservées prouvent son passage. Quant à François Ier, le séjour est bref. Une nuit. En 1525, le royaume est menacé au sud, en Italie. Le roi doit se rendre à Pavie pour guerroyer. Une célèbre bataille où il sera assiégé et fait prisonnier.
La dynastie de Noblet : En 1722, au terme d'une succession de ventes, le château est acheté par Bernard de Noblet. C'est, à l'époque, une famille de noblesse ancienne, ancien comte d'Anglure, près de Beaujeu. Une famille qui entretient de bons rapports de fidélités et de soutiens au roi. En contrepartie, Louis XV élève La Clayette en comtat. Le XVIIIe siècle ? Un siècle d'or pour les de Noblet. Une période de paix miraculeuse et de stabilité en ces temps obscurs de la Révolution. Alors que la plupart des châteaux sont envahis, pillés et vendus en bien national, le château est à l'écart. Une garnison s'installe, entretient le château et va même jusqu'à fabriquer du salpêtre dans la cuisine. Tout juste la famille a été tenue en résidence surveillée. Elle entretient de bons rapports avec la population locale. Conséquence : au terme de la Révolution, les lieux sont restitués aux de Noblet.
Peu de temps après, Étienne Angélique Victor de Noblet béni pour la seconde fois sa chapelle privée dans l'une des tours. Il fait alors appel à l'évêque d'Autun qui n'est autre que .... Talleyrand ! L'homme d'influence, « le diable boiteux » de Napoléon Ier et Louis XVIII. Depuis, les de Noblet ont surtout modifié l'allure extérieure du château. La partie Nord subit un profond remaniement et adopte un style néogothique. Quant au pont-levis, ne vous méprenez pas, il n'a rien de médiéval, c'est une imitation érigée au XIXe siècle. Certainement par nostalgie romantique des aventures chevaleresques. Aujourd'hui, le château n'est plus la résidence principale de la famille de Noblet, désormais parisienne. Mais elle revient occuper les lieux en période estivale. Neuf générations après, elle s'efforce de sauvegarder la mémoire d'un patrimoine familial mais aussi local.
Le château de Crary : incendié pendant les guerres de religion
Château discret en bordure d'Ozolles, Crary a vécu ses heures de gloires et ses drames au XVe siècle. Un site qui fera les frais des affrontements entre catholiques et protestants. Le responsable : l'amiral de Coligny.
Le château est situé sur une terre riche. Au carrefour du Mâconnais, du Beaujolais et du Brionnais, sa localisation stratégique a été sa force comme sa faiblesse. Bâti au XVe siècle, ses murs ont été les témoins d'épisodes historiques peu fréquents dans notre région. Guerres, pillages, incendies, convoitises ne l'ont pas épargné. Et pourtant, voilà qu'un demi-millénaire après, la famille de Boisset, héritière des lieux, s'efforce de lui redonner vie.
Juin 1570 : la proie des flammes : XVIe siècle, le siècle de la Renaissance et de l'humanisme pour le royaume de France comme dans tout l'Occident tardo-médiéval. Toujours est-il que pendant ce temps, les Français se déchirent, se persécutent et s'entre-tuent sur fond de religions. Souvenez-vous ! Nous sommes au XVIe siècle. C'est le temps de la réforme protestante. Partout, Calvin, Luther et autres prédicateurs prêchent çà et là. Les affrontements sont fréquents, les conflits meurtriers. En 1570, Crary a souffert de ces ravages... pratiquement réduit en cendres. C'est l'époque de la troisième guerre de religion. Et un homme va jouer, côté calvinistes, toute responsabilité dans l'incendie du château. Son nom : l'amiral de Coligny. Qui est-il ? C'est lui qui va conduire les armées des Huguenots (protestants) contre les troupes du roi de France Charles IX. Après ses défaites à Jarnac et Poitiers, il est contraint au repli vers le Sud. Un repli qui sera fatal pour Crary. Mécontentes, les troupes de Coligny détruisent tout ce qui est catholique. 6000 hommes, 3000 chevaux vont traverser le Brionnais, brûler le château du Terreau à Verosvres, l'église de Beaubery et pour finir Crary. Le bilan est lourd. Le donjon est détruit. Il faut reconstruire. Une période que les propriétaires vont mettre au service des lieux. Les fenêtres s'agrandissent, une grande nouveauté pour l'époque. Ce n'est pas tout. Une deuxième tour s'érige, le parc s'organise. Une rénovation longue mais payante.
La valse des propriétaires : Les propriétaires se suivent mais ne se ressemblent pas. Pourtant, à Crary, certains laisseront leur nom à la postérité. Parmi eux, un certain Gilbert de La Souche. Son nom ne vous dit certainement rien. Mais voilà, en 1681, il est mousquetaire au service du roi Louis XIV ! D'autres encore ont eu moins de chances. Pierre-Emmanuel du Myrat est le dernier seigneur de Crary et de Colombier. La raison ? Elle est toute simple. 1793 : épisode de la Terreur. Tristement célèbre pour M. du Myrat puisqu'il sera enfermé plusieurs mois dans les geôles d'un autre château, celui de Charolles.
Maire de père en fils : 58 ans ! Un record. Jamais autant de membres d'une famille ont occupé tant d'années au siège de la mairie. Une dynastie. Dès 1818, on en trouve traces. Pierre Emmanuelle Myrat est élu maire d'Ozolles et ce, jusqu'en 1832. Jean-Marie Vital, de 1892 à 1910. Tout ceci jusqu'à Jacques de Boisset, élu maire en 1939. Aujourd'hui encore, la famille occupe le conseil municipal de la commune mais plus le siège de premier magistrat. Comme tout château, celui de Crary a été confronté à la question de sa reconversion au XXe siècle. Contre l'oubli, les de Boisset ont trouvé la solution : en faire un espace unique de réception à l'échelle locale. Quelques coups de pioches, des manches retroussées, le chantier est lancé. L'orangerie, la grange et les dépendances ont toutes été aménagées pour accueillir des soirées toutes prestigieuses. En 2002, le comte de Paris, duc de France, en personne a choisi le château de Crary pour célébrer son 69e anniversaire, en compagnie de la duchesse et de ses proches. Cinq siècles plus tard, Crary renaît de ses cendres et retrouve tout son prestige.
Site internet du château de Crary
Meurtre, vols et exécution au château de Champvent
Aujourd'hui hameau de la commune de La Guiche, le château de Champvent est traversé de sombres épisodes. De près ou de loin, le bâtiment et son terroir ont été le théâtre, entre les XIV et XVIIIe siècle, d'affaires de meurtre, de vols et d'exécutions. Récit.
Situé sur la commune de La Guiche, le château de Champvent est élevé sur une motte artificielle. Sa localisation particulière, au nord, un étang endigué, au sud une étendue de verdure, en fait un lieu replié à part. C'est en 1646 précisément que le château actuel est achevé. On doit son architecture à François Martel, entrepreneur à Charolles. Son nom ne vous rappelle rien ? C'est le même maître tailleur de pierres qui réalisa les célèbres écuries de Chaumont. Une date gravée sur le fronton d'une des lucarnes. Mais le terroir de Champvent n'abrite pas que de tristes souvenirs. Bien au contraire.
Jules César est passé à Champvent ! Et oui, vous ne rêvez pas. Jules César en personne, le plus célèbre des romains, est passé par le territoire de Champvent. Comment cela est-ce possible ? Explication simple. Il y a environ vingt et un siècle de cela, nous sommes en pleine Guerre des Gaules. L'ami Jules se rend à Bibracte en -58 avant J-C pour repousser les Helvètes. Pour cela, il emprunte la voie romaine dont le tracé, est encore repérable, prouve son passage à proximité de Champvent. Mais, en -58, Champvent est une place forte seulement. Pas de château possible ! Le Moyen-Âge est encore loin.
Le seigneur de Champvent exécuté : Nous sommes en 1350. Le terroir de Champvent est dominé par un château à motte, très répandu à l'époque médiévale. Guillaume Quartehuil est alors seigneur et administrateur des lieux. Pourquoi finira-t-il exécuté ? Le XIVe siècle est le siècle du brigandage. Une pratique qui n'est pas réservée qu'aux bandits de grands chemins. Ils concernent aussi les seigneurs comme Guillaume. Il participe, sous la conduite du sire Huguenot de Saint-André, à l'attaque contre l'abbé Guillaume. Le duc de Bourgogne lance une campagne pour rechercher les coupables. Concluant. Mais Guillaume Quatrehuil s'échappe et reste absent de Champvent pendant plusieurs mois. Mais il commet l'erreur. S'imaginant le calme revenu, il retourne, imprudent, à Champvent. Il est arrêté, enfermé dans les cachots de Montcenis et pour finir, exécuté en 1352. Triste sort !
Le XVIIIe, le siècle obscur : La première moitié du XVIIIe siècle est agitée. Et c'est le moins que l'on puisse dire. En 1764, le cadavre d'une jeune fille âgée d'environ dix-huit ans est retrouvé dans les bois de Marizy, sur le terroir Champvent-La Guiche. Macabre découverte. Découverte noyée au milieu de l'étang, propriété des La Guiche, elle est dépouillée de ses vêtements. Elle est alors conduite à l'église de Champvent pour être enterré au cimetière. Une question demeure néanmoins. Qui a bien pu tuer la jeune fille et pour quel mobile ? Un admirateur éconduit agacé ? Un règlement de compte ? Une affaire de famille ? Le mystère reste entier deux siècles après. Autre fléau à Champvent : les vols. Plusieurs plaintes du curé ont été déposées à l'évêché et auprès du maire de Charolles contre les vols apportés à son presbytère par des voleurs de grands chemins. Une période d'insécurité relayée par un climat très lourd à l'époque révolutionnaire. Les rapports entre la famille Gouvenain, propriétaire du château, et le curé de Champvent, l'abbé Pocheron se tendent. Les tensions font place aux menaces. Conséquence : deux tentatives avortées d'incendie de l'église et du château ont pu être détournées à temps. L'abbé Pocheron sera finalement élu député aux États Généraux.
Après la Révolution, la nouvelle organisation territoriale plonge Champvent et son château dans l'isolement. La Guiche devient chef-lieu de canton tandis que Champvent n'est plus qu'un simple village. En 1810, Champvent perd son clocher, réduit en hameau. Aujourd'hui pourtant, la famille des Boscs l'a transformé en une résidence d'été festive.
Carte interactive des châteaux du Brionnais et de quelques châteaux du Charolais et du Roannais
Pour en savoir plus sur les châteaux forts et les sites médiévaux fortifiés de Bourgogne : Centre de Castellologie de Bourgogne
Guide des châteaux en Charolais-Brionnais