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Histoire du château de Marlieu à Sainte-Blandine

Château de Marlieu

Le château de Marlieu à Sainte-Blandine près La Tour-du-Pin - Cliquez pour agrandir

[Source : Docteur André Dénier, Histoire des Châteaux de La Tour-du-Pin, Revue Évocations, AD38, PER970/1, 1945-1948]

Le château de Marlieu est relativement récent. Il a été édifié en 1760 par Geneviève Louise de la Vieuville (1), veuve du marquis de Murinais en remplacement du vieux château du Chatelard de Montagnieu qui se délabrait et n'était plus au goût du jour.

La marquise habita Marlieu avec ses quatre enfants. C'était une maîtresse femme qui ne badinait pas sur l'exercice de ses droits seigneuriaux.

C'est ainsi qu'avec l'autorisation du Bureau des finances de la Généralité de Grenoble, en date du 4 juin 1776, elle fit défense à divers particuliers de détourner les eaux pluviales coulant des grands chemins sur leurs terres. Elle voulait les astreindre sans doute à souffrir le ruissellement selon la pente des chemins versants. Ce qui a toujours été de droit. Mais il y a la manière. La sienne était rude.

Elle possédait de temps immémorial (2) un droit d'avenage perçu sur les propriétaires des bestiaux qui allaient pâturer au marais. Tous les propriétaires ne résidant pas dans les murs de La Tour-du-Pin y étaient astreints. Ils en refusaient le payement et déclaraient qu'ils ne mèneraient plus leurs bêtes au marais. Depuis un demi-siècle, la culture de la luzerne et du trèfle s'était généralisée en Dauphiné et il est bien probable que la pâture au marais ne compensait pas la valeur du droit d'avenage, à savoir une éminée d'avoine, c'est-à-dire quarante livres imposées pour chaque bête.

Un procès s'engage. Le 16 février 1783, les paysans de Sainte-Blandine, Montagnieu et Torchefelon molestent les huissiers qui apportent les exploits.

Le 5 octobre suivant, sur ordre du Parlement, un huissier flanqué de la maréchaussée, parcourt le pays pour faire exécuter l'arrêt. Le tocsin sonne. Les paysans s'arment de tridents, de fourches, de haches. Ils se groupent au nombre de 600 environ. Il y a deux blessés dans l'escorte de l'huissier et trois parmi la foule. Le cas est grave puisqu'il y a rébellion contre l'autorité royale.

M. de Reynaud, procureur général, emploie la méthode habituelle pour calmer les communautés récalcitrantes. Il met chez elles en subsistance cent cavaliers du régiment de Bretagne avec quatre officiers. Lourde charge très redoutée des paysans. Ces troupes restèrent jusqu'au 10 novembre à Doissin. Enfin à la demande de M. de Reynaud, la belliqueuse marquise consentit à transiger en rabattant un quart sur les arrérages qui lui étaient dus.

Mais les meneurs furent condamnés, le 21 août 1786, deux à dix ans de galères et cinq à trois ans de bannissement. Toutefois Benoît Perrin, l'un des galériens fut gracié au bout de deux ans.

Menu débat, certes, mais combien symptomatique ! Une législation désuète prétend contraindre les agriculteurs à payer une pâture dont ils n'ont que faire. On comprend qu'ils aient accepté la Révolution avec joie.

Les enfants de la marquise de Murinais ne devaient pas lui ressembler.

L'aîné, Antoine, qui avait épousé Mlle de la Forest-Divonne, se fixa définitivement à Marlieu et laissa la terre patrimoniale de Murinais à son cadet Timoléon.

Antoine de Murinais n'émigra pas pendant la Révolution. Il resta chez lui avec sa femme et son beau-frère, protégé contre tout danger par l'affection des habitants des communautés voisines. Ses biens ne furent pas confisqués. Après la bataille de Marengo il recueillit M. Costa de Beauregard qui avait reçu, au nom des Austro-Sardes, de la bouche de Bonaparte, l'énoncé des conditions de paix entre la France et l'Autriche. Antoine de Murinais mourut en 1815.

Sa veuve continua à résider à Marlieu. Elle pratiquait l'hospitalité à un point admirable et vivait entourée de nombreux neveux et nièces. Un jeune ménage de la Forest-Divonne étant venu lui rendre visite pendant une semaine, y resta trente ans et eut chez elle, dix enfants, tous nés à Marlieu.

L'inséparable compagne de Madame de Murinais était la comtesse Justine de Divonne. Celle-ci créa en 1844 le petit couvent de Sainte-Blandine où elle appela les Sœurs de la Croix, congrégation fondée par Adélaïde de Murinais, nièce de la marquise.

Justine de Divonne décéda à Marlieu le 29 août 1813, à l'âge de quatre vingt ans.

Timoléon de Murinais recueillit la succession de son frère. Il avait épousé une demoiselle de Loras-Bel Accueil dont le père avait porté sa tête sur l'échafaud à Lyon en 1794. Il en eut quatre enfants, dont un seul fils, Charles. Charles mourut sans enfant après avoir épousé Henriette de Loras et Madame du Parc.

Marlieu passa au baron de Viry qui avait épousé Aglaé de Murinais, sœur de Charles.

En 1895, M. de Viry mit ce domaine de 93 hectares en vente au prix de 52.000 francs. Il fut acquis par M. Arnauld des Essarts.

La ferme du domaine, transformée, devint d'abord une laiterie qui ravitaillait les hôpitaux de Lyon. Par la suite, une chocolaterie dont la marque est connue dans toute la France lui fut adjointe (3).

Il n'a été trouvé aucun vestige de construction autour du château actuel. Celui-ci est donc une restauration de l'édifice construit par Mme de Murinais. L'épaisseur des murs, les cintres des fenêtres, la grande cheminée de pierre de la cuisine, refaite en 1787, une cheminée de pur style Louis XV le démontrent suffisamment. Les communs, qui croulaient de vétusté en 1895, étaient vastes et témoignaient de la large hospitalité pratiquée dans cette demeure. Il y avait deux fours, l'un pour le service de la maison, l'autre construit près de la porte d'entrée. On raconte qu'en temps de disette, M. de Murinais, propriétaire de Murinais y faisait cuire le pain une fois la semaine. Venait en chercher qui en manquait.

Dr A. Dénier.

Notes :
(1) Ennemond-Bernard d'Auberjon, Sgr de Murinais, marié à Julie-Catherine de Meuron, fit enregistrer son blason à l'Armorial général de 1696. Il fut père de haut et puissant seigneur messire Pierre-Joseph d'Auberjon, Sgr de Murinais, capitaine de cavalerie, chevalier de Saint-Louis, qui épousa le 10 juillet 1719 Louise Savary de Brèves. Celui-ci laissa une fille mariée en 1749 au marquis Costa de Beauregard et deux fils dont l'aîné, Louis-François d'Auberjon, connu le premier sous le titre de marquis de Murinais, marié à Mme de la Vieuville, fille du marquis de Saint-Chamond, et tué à la bataille de Minden en 1759, continua la descendance et dont le cadet, Antoine-Victor, fut admis en 1743 dans l'ordre de Malte (Dictionnaire des familles françaises anciennes ou notables à la fin du XIXe siècle, C. d'E.-A.)
(2) Archives de La Tour-du-Pin.
(3) La plupart de ces renseignements sont dus à l'amabilité de M. de Parscau, propriétaire actuel du domaine et gendre de M. des Essarts.

Bibliographie : Armorial du Dauphiné ; Archives de la paroisse de Sainte-Blandine ; Archives de la ville de La Tour-du-Pin ; Documents de M. Greyffié, de Bellecombe.

Auberjon de Murinais

Blason des d'Auberjon de Murinais (Armorial d'Hozier) - Cliquez pour agrandir
D'or à la bande d'azur chargée de trois hauberts ou cottes de mailles d'argent

La laiterie de Marlieu

M. Arnaud des Essarts, propriétaire-agriculteur à Marlieu (Isère), fait également du ramassage et expédie surtout aux Hospices civils de Lyon. « La laiterie de Marlieu, nous écrit M. Arnaud des Essarts, située dans une région d'abondants pâturages, reçoit des fermiers et propriétaires de ses environs immédiats des quantités de lait qui varient suivant les saisons. Elle se compose de plusieurs succursales, établies dans différentes régions du département, où le travail de laiterie est approprié aux quantités de lait reçu dans chaque établissement, et aux moyens de transport dont on dispose. Alors que dans les succursales on ne fabrique que du beurre et différents fromages, qui sont expédiés dans le Midi et la région lyonnaise, à Marlieu même se fait exclusivement la pasteurisation et la stérilisation des laits frais. Ce travail, très minutieux, se fait selon les principes de la technologie laitière moderne. Le lait, après traitement, est expédié chaque nuit par wagon complet sur Lyon, où il est distribué fort peu d'heures après l'expédition. Les établissements hospitaliers de la ville de Lyon en absorbent une grande partie. »

Laiterie de Marlieu

Consommation de lait dans les hôpitaux lyonnais en 1916 - Cliquez pour agrandir
Source : Approvisionnement en lait de l'agglomération lyonnaise, Dr Georges Birbis (1916)

Le chocolat de Marlieu

Amédée Arnaud des Essarts déposa le 15 avril 1933 au greffe du tribunal de commerce de Bourgoin la marque « Blandin » destinée à désigner des chocolats de toutes sortes et sous toutes formes produits par la chocolaterie de Marlieu.

Amédée Arnaud dit des Essarts, né à Autun en 1866, était le fils d'Alexandre Arnaud décédé en 1872 à Montreux et de Catherine Roizot. Inspecteur de la compagnie d'assurances Le Phénix et domicilié à Grenoble, il épousa en 1893 Jeanne Lassalas. Leur fille, Colette, née en 1897 à Sainte-Blandine, épousa en 1919 à Sainte-Blandine Edmond de Parscau du Plessis. Leur arrière-petit-fils, Pierre de Parscau, dirige actuellement la chocolaterie de Marlieu.

D'après les registres de commerce du tribunal civil de Bourgoin (AD38, 5U1236), la société « Laiterie chocolaterie de Marlieu » avait été enregistrée le 15 décembre 1920 à 14h10 sous le n° 1399 au nom de Mr Arnaud des Essarts Amédée né le 19 décembre 1866 à Autun (Saône-et-Loire). L'objet du commerce est rédigé ainsi : Lait, beurres, fromages et fabrication du chocolat. Le siège social est établi à Sainte-Blandine. Cette inscription au registre du commerce prolonge la société fondée en 1900. Une déclaration modificative sera inscrite le 22 décembre 1939 par suite du décès de Mr Arnaud des Essarts survenu à Sainte-Blandine, au château de Marlieu, le 13 octobre 1939.

Chocolats Blandin

Dépôt de la marque de chocolat "Blandin" en 1933 - Cliquez pour agrandir
Source : Revue de la chocolaterie, confiserie, biscuiterie, confiturerie - août 1933

Chocolat de Marlieu-1 Chocolat de Marlieu-2

Éditions du chocolat de Marlieu - Cliquez pour agrandir
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