L'église Saint-Symphorien de Chassigny
La translation de l'église paroissiale de Chassigny-sous-Dun, du Vieux bourg au hameau de Villard, fut autorisée par arrêté en date du 30 juillet 1852. C'était l'aboutissement de nombreux pourparlers qui opposèrent vivement les habitants du Vieux bourg, partisans de la conservation de l'ancien édifice et de son agrandissement, et une forte majorité de ressortissants de la commune désireuse de rapprocher le lieu de culte de la généralité des habitations.
Dès 1826 en effet, 52 ressortissants du bourg de Chassigny avaient, dans une déclaration reçue par Me Jean-Baptiste-Marie-Isidore Gay, notaire royal à Chauffailles, le 3 février, nettement formé opposition au projet de translation de l'église paroissiale ; et M. Merlin, ancien maire de la commune, mis en place en 1815, écrivait en ces termes au Préfet de Saône-et-Loire le 11 février de la même année 1826 : « M. Sarton du Jonchay qui me remplace quoique propriétaire forain de cette commune n'a convoité cette administration que pour faire opérer le transport de notre église qui est toute neuve, dans sa propriété lieu de Vilars, sous le prétexte de la raprocher du centre de la commune, mais avec un motif déguisé de donner une grande augmentation de valeur à sa propriété ... » (Archives de Saône-et-Loire. Série O 489).
En 1841, les partisans du transfert du lieu de culte réclamaient dans une pétition en date du 8 mars, que l'église paroissiale ne soit ni réparée ni agrandie, et sollicitaient une nouvelle fois sa translation, en l'accompagnant d'une liste de souscription se montant à 10.350 francs. Le 1er août suivant le Conseil municipal se prononçait de manière positive sur la translation car, sur un total de 194 maisons constituant le patrimoine immobilier de la commune, 133 feux seraient plus rapprochés de l'église, 49 resteraient à égale distance, 12 seulement se trouveraient plus éloignés ; mais, le 26 décembre 1845 une fiche de renseignements statistiques, tout en reconnaissant que « l'église se trouve en mauvais état, insuffisante pour la population et nécessiterait une reconstruction à neuf », laissait apparaître que, malheureusement, la reconstruction coûterait 15.000 francs, et qu'elle ne pouvait y consacrer, à cette date, que 7000 francs. D'où l'acharnement des partisans de la conservation de l'ancien lieu de culte qui, dans une pétition en date du 6 mai 1851, offrirent même de subvenir aux frais d'agrandissement de l'église, à l'aide d'une souscription de 4192 francs à laquelle participaient, notamment, les frère et sœur Antoine et Françoise Gille, particulièrement attachés à la défense de cette cause. C'est à partir du 10 mai 1851 que 5 délibérations successives conduisirent les représentants municipaux à déclarer l'ancienne église « insuffisante » et « mal placée », à accepter de Claudine Chevalier, épouse de Côme Ducarre, ancien maire (1), la donation d'un terrain au hameau de Villars lieu dit « La Terre dessus » pour y construire la nouvelle église (donation en date du 8 août 1852, M. Millier étant maire ; acte de donation daté du 28 novembre 1851) ; à acquérir, pour 300 francs, un terrain de 39 ares 90 ca des cohéritiers Robin.
(1) Claude Chevalier avait acquis en 1842 « la Terre dessus » de la famille Sarton du Jonchay ; Côme Ducarre, époux de Claudine Chevalier, reçut ce bien, par alliance ; le surplus de la parcelle fut transmise d'une part, à Claude-Marie Ducarre, domicilié au Pont-Chevalier (Mussy-sous-Dun) et de l'autre, à Pierre-Marie Ducarre.
L'architecte Berthier, de Charolles, avait déjà été chargé de l'étude de plans et devis lesquels, présentés le 10 novembre 1851, et approuvés par le Conseil des bâtiments civils le 17 décembre suivant, furent ratifiés par délibérations municipales des 4 janvier et 21 mars 1852. La dépense totale se monterait à 19.497,50 francs, déduction faite des frais de transport des matériaux et des honoraires de l'architecte. Les autorisations officielles furent effectivement données jusqu'à concurrence de cette somme, pour des travaux en régie devant être exécutés sous la surveillance de la commune et avec la direction de l'architecte Berthier. La dépense serait ordonnancée de la façon suivante : souscription du 21 avril 1851 (avec, en tête des souscripteurs : MM. Antoine Terrasse de Tessonnet (1500 francs) ; les deux frères Millier, de Molleron (800 francs), le curé Condemine (100 francs) du montant total de 10150 francs ; contribution de la fabrique : 5000 francs ; emprunt ; 6000 francs ; matériaux de démolition : 2000 francs ; pierre déjà extraite représentant 1000 francs ; transport des matériaux chiffré 3000 francs ; au total un revenu de 27.150 francs. Un secours de 1500 francs fut octroyé par le Ministre des Cultes.
L'arrêté préfectoral du 30 juillet 1851 déclarant autorisée la translation de l'église à son nouvel emplacement, au Villars, avait donné l'impulsion définitive et irrévocable pour la concrétisation du projet en gestation difficile depuis tant d'années.
Des travaux de gré à gré furent entrepris, au début de ce siècle, à la sacristie pour un montant de 901,60 francs ; marché conclu avec l'entrepreneur Etienne Lamure le 20 août 1913, après délibération municipale du 1er juin ; réception d'œuvre datée du 15 décembre 1913.
En 1946 eut lieu la restauration du clocher selon le devis de Marcel Lamure, entrepreneur à Chassigny-sous-Dun, sous la surveillance de l'architecte départemental P.C. Fournier, résidant à Chalon-sur-Saône ; le Ministre de l'Intérieur ayant octroyé à la commune une subvention de 16.000 francs, par décision du 19 décembre 1945 ; réception d'œuvre le 10 mai 1947.
Description (Photos p. 6-11/11) :
L'église de Chassigny-sous-Dun, pastiche hybride romano-gothique, se compose d'une nef de cinq travées voûtée de fausses ogives très minces, tandis que les bas-côtés portent des voûtes d'arêtes, d'une abside semi-circulaire précédée d'une travée de chœur et accostée de deux absidioles ; les piles rondes qui séparent la nef des bas-côtés sont surmontées de chapiteaux sculptés.
A l'extérieur, clocher-porche ; portail à trois voussures linteau à rosaces ; tympan sculpté, orné d'un livre ouvert gravé de l'inscription :
Verbum caro factum est
Urbi Petrus ibi Ecclesia
surmonté d'une tiare et des insignes pontificaux ; le tout encadré par des festons polylobés. L'ensemble est imité des procédés décoratifs du front roman de Charlieu. Les soubassements du portail portent la mention gravée :
Fait par les soins (à gauche)
de Claude Marie Millet (à droite)
entre tympan et linteau, sur la moulure : Ex Maire Millet
Sous le porche, petit bénitier encastré, sculpté de guirlandes de feuilles de vigne et de pampres.
La porte latérale de l'église, au Sud, présente également un tympan et un linteau ouvragés dans la tradition brionnaise.
Tout le décor sculpté de l'église est très soigneusement travaillé, et compose avec la croix érigée en façade, décrite d'autre part, un ensemble attachant.
Source : AD71, Inventaire du patrimoine, Chassigny-sous-Dun, Eglise St-Symphorien, 11 pages